Les couleurs de Monet

In English :
Colors used by Monet Claude Monet


 Claude Monet, Le Chemin dans les Iris 1914-1917, détail


Claude Monet, Coin d'atelier, 1861
L'art impressionniste est fondé sur l'utilisation de la couleur, qui doit à elle seule "dessiner" le motif sans recours à la ligne.

Au début de sa carrière, Monet emploie des couleurs sombres, comme dans le Coin d'atelier marqué d'ombres noires. Sa peinture évoque l'école réaliste dominée par Courbet.

A partir de 1860, Monet abandonne les couleurs sombres et travaille avec une palette limitée à des couleurs claires pures. En 1905, il écrit, en réponse à une question de son marchand de tableau :

"Bref, je me sers de blanc d'argent, jaune cadmium, vermillon, garance foncée, bleu de cobalt, vert émeraude. Et c'est tout."

L'analyse des couleurs a permis d'identifier les couleurs et le liant de la peinture : de l'huile de pavot et de l'huile de lin. La première sèche plus lentement et jaunit moins, on la retrouve notamments dans certains empâtements blancs.

La question du noir

Le noir pur est rare chez les impressionnistes. Monet obtient souvent une apparente noirceur en combinant diverses couleurs vives : des bleus, des verts et des rouges. Il élimine presque totalement le noir de sa peinture, même dans les ombres, comme celles violettes des Bateaux de plaisance à Argenteuil.

Ce parti pris d'éviter l'emploi du noir est tellement ancré dans la manière de Monet qu'à sa mort, son ami Georges Clemenceau retira le drap noir qui devait recouvrir le cercueil entre la maison et l'église, en s'écriant : "Non ! pas de noir pour Monet." Il le remplaça par une étoffe aux couleurs des fleurs que le peintre aimait.


Claude Monet, Bateaux de plaisance à Argenteuil, 1875

Les couleurs vues par un oeil malade

En 1908, à 68 ans, Monet est atteint de cataracte aux deux yeux, il commence à perdre la vue. On trouve les premiers signes de cette cataracte dans les peintures de Venise en 1908.

Une cataracte est une opacité progressive du cristallin qui filtre les couleurs. À mesure que la cataracte évolue, les blancs deviennent jaunâtres, les verts, jaune-vert et les rouges, orangés. Les bleus et les violets font place aux rouges et aux jaunes. Les détails s'estompent, les contours disparaissent pour devenir un peu flous.

Quand sa vision des couleurs s'altère, Monet continue de travailler. Le peintre repère les teintes d'après les étiquettes des tubes et l'ordre immuable dans lequel il les dispose sur sa palette. « Ma mauvaise vue signifie que je vois tout comme au travers d’un brouillard », écrit-il. « C’est tout de même très beau, et c’est ce que j’aimerais pouvoir représenter. »


Claude Monet,
Le Grand Canal et Santa Maria della Salute,
1908


Claude Monet, Le Bassin aux Nymphéas, 1899
Monet a l'habitude de peindre vraiment ce qu'il voit. Peu à peu ses peintures ont des teintes qui s'accentuent dans les rouges et les jaunes. Les détails s'estompent également. Les bleus ont tendance à disparaître.

Quelques tableaux qui représentent le même motif permettent de se rendre compte des effets de la cataracte sur Monet, par exemple « Le Pont japonais à Giverny – le Bassin aux Nymphéas », réalisé l'un en 1897, l'autre en 1923. Une fois la cataracte de son meilleur œil devenue mûre, les contours deviennent de plus en plus imprécis et les détails disparaissent. Monet ne voit plus les teintes froides, les violets et les bleus disparaissent au profit des rouges.


Claude Monet, Le Pont japonais, 1923

En 1911, Monet écrit à un ami : « Il  y a trois jours, j’ai constaté avec terreur que je ne voyais plus rien de l’œil droit. »

En 1914, Monet commence à peindre des tableaux sans effet de perspective — probablement parce que son acuité visuelle binoculaire, qui donne la sensation du relief, est très diminuée. Sa perception des couleurs est également faussée. « Je ne voyais plus les couleurs avec la même intensité », écrira-t-il plus tard. « Les rouges avaient perdu leur éclat, les roses étaient insipides et les couleurs intermédiaires et les tons froids m’échappaient. »

Au cours des années qui suivent, l'œil gauche de Monet perd progressivement son acuité et, à l’été de 1922, sa vue a tellement baissé qu’il doit cesser de peindre. Il est alors presque aveugle.

Toutefois, il finit par céder à la pression de son grand ami Georges Clemenceau, et consent à se faire opérer d'un oeil. Après deux interventions chirurgicales en janvier 1923, et grâce au port de lunettes spéciales, Monet recouvre l'usage de l'oeil droit. Le verre correcteur est teint en vert pour rectifier la vision des couleurs. Mais Monet subit diverses séquelles de l’opération : la perturbation de la vision des couleurs, la vision double, et la distorsion des images visuelles. Il refuse l’opération de la cataracte de l’œil gauche.


Claude Monet après son opération.

Claude Monet, La maison vue du jardin aux roses, 1922-1924

Monet recommence à peindre dès 1923. La maison vue du jardin de roses témoigne de son opération. Dans cette série, Monet a tantôt peint avec son œil atteint de cataracte - tout est rouge, le ciel est jaune - et tantôt avec son œil opéré - tout est bleu ou de couleur froide.

“ Je vois bleu, je ne vois plus le rouge, je ne vois plus le jaune ; ça m'embête terriblement parce que je sais que ces couleurs existent; parce que je sais que sur ma palette il y a du rouge, du jaune, il y a un vert spécial, il y a un certain violet ; je ne les vois plus comme je les voyais dans le temps, et pourtant je me rappelle très bien les couleurs que ça donnait. ”

Malgré ce handicap, Claude Monet continue de peindre jusqu'en 1926, quelques mois avant sa mort.

Les couleurs de Monet vues par une illustratrice

Bijou Le Tord est l'auteur du livre 'A Blue Butterfly' (Un papillon bleu) qui raconte l'histoire de Claude Monet aux jeunes enfants.

"Pendant le voyage que j'ai fait à Paris et à Giverny pour préparer ce livre, rien de ce que j'avais vu ou ressenti ne me préparait à ce que j'allais rencontrer au Musée de L'Orangerie à Paris. Une partie de ce musée a été construite pour abriter les Grandes Décorations, aujourd'hui connues dans le monde entier.
Debout devant ces étonnantes peintures, j'ai dû me poser humblement la question : comment faisait-il cela, en utilisant si peu de couleurs ?
Lorsque j'ai été prête à peindre mon livre, j'espérais que j'aurais le courage d'utiliser les mêmes couleurs que Monet. Et je l'ai fait, en suivant la liste avec laquelle il a travaillé pendant la dernière partie de sa vie. Nous savons maintenant que cette liste était incomplète. Elle ne compte que huit couleurs : blanc, bleu cobalt clair, vert émeraude, outremer, vermillon (rarement), jaune cadmium clair, et jaune citron. "Et c'est tout", comme se serait exclamé Monet lui-même.
Ce ne fut pas facile pour moi d'utiliser la palette de quelqu'un d'autre. Mais par une étrange coïncidence, mes propres couleurs étaient très proches de celles de Monet."


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Exposition à Paris en 2012-2013 : "L'impressionnisme et la mode" au Musée d'Orsay

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Modifié le : Wednesday, 25-Oct-2006 13:42:25 EDT